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Que peut-on apprendre de la diffusion du crack à Genève ? Une étude d'Addiction Suisse fait le point sur la situation

Que peut-on apprendre de la diffusion du crack à Genève ? Une étude d'Addiction Suisse fait le point sur la situation
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Lausanne (ots)

La problématique du crack à Genève a occupé l'espace médiatique en 2022. Mais que s'est-il passé et que peut-on en apprendre ? Sur mandat de la Direction Générale de la Santé genevoise, Addiction Suisse a interrogé des personnes qui consomment du crack mais aussi des membres de la police ou des services de santé et sociaux. Des données locales, nationales et internationales ont également été réunies. Il en ressort que l'arrivée d'une offre prêt-à-consommer et à bas prix a induit une hausse de l'usage de crack et une rapide détérioration de la santé de certaines personnes. Il faut désormais renouer les liens avec elles, répondre à leurs besoins immédiats et adapter les prises en charge à leurs capacités.

Le crack est de la cocaïne que l'on peut fumer et que l'on nomme ainsi à cause du bruit qu'il fait lorsqu'il est brûlé. Ses effets sont rapides et puissants ce qui peut conduire à une consommation intensive qui amène certaines personnes à négliger leurs besoins fondamentaux comme l'alimentation et le sommeil. En Suisse, le crack est en général préparé en petites quantités à partir de poudre de cocaïne par ceux qui le consomment.

Nouvelle offre et hausse de la consommation

Des collectes de données menées il y a 5-6 ans montrent que la consommation de crack était déjà largement répandue en Suisse, particulièrement dans certaines villes alémaniques. Genève faisait figure d'exception : on y consommait beaucoup d'héroïne mais très peu de crack. La situation a rapidement changé en 2021 avec l'apparition de vendeurs de crack qui proposent de petites doses à très bas prix. La soudaine et grande accessibilité du produit à Genève a conduit à une diffusion rapide de son usage : alors qu'en 2019 et 2020 seul un quart des personnes fréquentant le local de consommation Quai 9 y avaient consommé du crack, cette proportion était de 45% en 2021 puis de 62% en 2022. Presque tous consomment aussi de l'héroïne et d'autres produits.

Détérioration de la situation

Comme dans d'autres villes (Paris, Brême, Dublin, etc.), la diffusion du crack a entraîné une péjoration de la situation au niveau des personnes qui consomment des drogues, avec une détérioration de leur état de santé physique et psychique, mais aussi au niveau du dispositif de prise en charge, avec des ruptures de traitement et des contacts plus difficiles. Quai 9 a été confronté à une spectaculaire hausse des épisodes de consommation de crack (17'066 en 2022 contre 3'400 en 2019) et à davantage de comportements problématiques (incivilités, violences). L'apparition de scènes de consommation et/ou de deal, principalement dans les quartiers des Pâquis et des Grottes, a quant à elle pesé sur la vie dans l'espace public à Genève et fait naître des polémiques.

Répondre aux besoins immédiats et réajuster la prise en charge

Les professionnelles et professionnels genevois ainsi que les usagères et usagers de crack interrogés ont recommandé des interventions similaires à celles qui avaient déjà été développées durant les années 1990 en Suisse : aller à la rencontre des personnes qui consomment, répondre à leurs besoins immédiats (manger, boire, se reposer, se loger, consommer dans un espace sécurisé et avec du matériel propre, recevoir des soins de base) et réajuster les traitements et prises en charge à leurs capacités. Un focus sur les personnes dont la situation se détériore le plus a aussi été mis de l'avant.

A la demande du canton, l'association Première Ligne a développé un plan d'action qui inclut la mise en place d'un sleep-in dans les locaux de Quai 9, la création de maraudes, l'allongement des heures d'ouverture d'un lieu d'accueil diurne et la mise à disposition de matériel de consommation. Des villes européennes confrontées à une situation similaire ont encore envisagé d'autres mesures comme la distribution de colis alimentaires, des offres d'hébergement facilement accessibles ou la possibilité de " mises au vert " à travers des séjours en institution. L'importance de réunir ces mesures dans le cadre d'un plan d'action a aussi été soulignée.

Deux outils pour prévenir : le monitorage du marché et la coopération

La problématique du crack à Genève s'est développée à travers une transformation rapide de l'offre de drogues. Pour pouvoir prévenir un tel changement à l'avenir il va falloir réfléchir aux moyens qui permettent d'éviter une telle transformation ou d'y réagir plus rapidement. Un monitorage du marché des drogues et une coopération très étroite entre les institutions sanitaires, sociales et policières font partie des outils pour atteindre ces objectifs, à Genève comme dans tous les autres cantons de Suisse.

Voici le rapport de recherche : La problématique du crack à Genève - Situation et réponses - Rapport de recherche N° 153

Deux types de crack ?

Les personnes qui consomment du crack à Genève en distinguent deux types : celui qu'elles préparent elles-mêmes à partir de poudre de cocaïne et celui qui est préparé par les trafiquants et vendu en rue. Le premier est selon elles de " meilleure qualité " que le second, perçu comme étant moins pur et coupé avec différentes produits (amphétamines, benzodiazépines, etc.). Les effets de ce " crack de rue " sont ressentis comme étant plus brefs et stressants, ce qui le rendrait particulièrement addictif.

L'Ecole des sciences criminelles de l'UNIL a analysé des échantillons des deux types de crack qui se distinguent par leur apparence. Très peu de différences ont pu être observées au laboratoire : les taux de pureté moyens étaient élevés, supérieurs à 70%, et le principal produit de coupage était la phénacétine pour les deux types de crack. La différence ressentie pourrait donc provenir d'autre facteurs comme les dosages ou les conditions dans lesquelles le crack est acheté et consommé.

Contact:

Frank Zobel
Vice-directeur d'Addiction Suisse et co-auteur de l'étude
fzobel@addictionsuisse.ch
tél. 021 321 29 60

Nicole Egli Anthonioz
Cheffe de projet de recherche et co-auteure de l'étude
neglianthonioz@addictionsuisse.ch
tél. 021 321 29 56

Markus Meury
Porte-parole
mmeury@addictionsuisse.ch
tél. : 021 321 29 63

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