Logo Presseportal

Version complète du Presseportal

Panorama suisse des addictions 2024 / Les jeunes : plus vulnérables et pas assez protégés - il faut agir maintenant !

Une image:
Prévisualisation  HiResDownload
Un document :
Download (1,5 MB )
21.03.2024 – 05:00  Sucht Schweiz / Addiction Suisse / Dipendenze Svizzera    [newsroom]

Lausanne (ots) -

La santé psychique des adolescent·e·s et des jeunes adultes s'est globalement détériorée, et cette dégradation ne date pas seulement de la pandémie. Les filles et les jeunes femmes sont particulièrement touchées. Parallèlement, la prévalence de la consommation de substances psychoactives a en partie augmenté chez les adolescent·e·s ou s'est maintenue à un niveau trop élevé.

Davantage de jeunes sont vulnérables et présentent ainsi un risque accru de consommer des substances psychoactives ou de se réfugier sur les réseaux sociaux. Addiction Suisse constate que les mesures en place actuellement ne suffisent pas pour les protéger. La politique doit passer à la vitesse supérieure : il faut améliorer et intensifier la prévention et soutenir les jeunes.

En Suisse, la plupart des jeunes vont bien, mais la part de ceux·celles qui ne se sentent pas bien s'est accrue. Les filles de 13 et 15 ans sont particulièrement touchées. C'est là un des constats de l'étude nationale Health Behaviour in School-aged-Children (HBSC) menée en 2022 auprès des 11 à 15 ans.

Les données de la dernière Enquête suisse sur la santé, réalisée en 2022, révèlent un tableau similaire : la part des jeunes femmes de 15 à 24 ans souffrant de détresse psychologique moyenne à élevée s'est accrue par rapport à 2017 ; elle est passée de 3,9 % à 8,7 %. La part de celles traitées pour un problème psychique dans les douze derniers mois a aussi progressé, de 7 % à 14 %.

La pandémie a très certainement joué un rôle dans cette dégradation, mais des études montrent que cette tendance s'est amorcée déjà avant.

Consommation de substances toujours à un niveau élevé

Selon les données de l'étude HBSC de 2022, la consommation de substances psychoactives reste importante chez les jeunes et s'est même accrue s'agissant des produits du tabac et de la nicotine. La consommation de cigarettes conventionnelles n'a pas reculé et un nouveau groupe d'utilisateurs·trices de la cigarette électronique et du snus a émergé. Les filles sont davantage concernées que les garçons. La hausse de la consommation de cigarettes conventionnelles et d'alcool chez les jeunes de 13 ans est particulièrement préoccupante.

Les données sur les activités en ligne montrent qu'en 2022, 4 % des garçons et plus du double de filles (10 %) de 15 ans présentaient un usage problématique des réseaux sociaux ; chez les filles, ce taux a plus que doublé par rapport à 2018.

Santé des jeunes et consommation de substances

La consommation de substances psychoactives chez les jeunes est influencée par de nombreux facteurs individuels et environnementaux, qui sont liés entre eux. Les facteurs de risque comme le stress, une mauvaise santé ou encore un marketing intense et un accès facile aux produits augmentent la probabilité de consommer. À l'inverse, les facteurs de protection, comme une bonne santé psychique, le soutien et la confiance des parents la réduisent. L'étude HBSC a mis en évidence une association entre, d'une part, une mauvaise santé, un manque de bien-être psychique, un stress ressenti comme important et, d'autre part, une consommation plus fréquente d'alcool, de cigarettes conventionnelles et d'e-cigarettes. Même constat pour les médicaments pris " pour se droguer ". Enfin, la moitié des jeunes de 15 ans ont souvent utilisé les réseaux sociaux pour fuir des sentiments négatifs en 2022 (en 2018, le taux était d'un tiers).

Renforcer la prévention maintenant !

Une prévention efficace met d'une part en place des mesures de régulation et agit sur les facteurs environnementaux, et, de l'autre, encourage les comportements favorables à la santé chez l'individu. Ces deux approches sont nécessaires pour prévenir et réduire la consommation de substances psychoactives et les usages problématiques chez les jeunes. Certains facteurs, comme la situation géopolitique mondiale, le changement climatique, la place occupée par les réseaux sociaux et la vie scolaire pèsent plus fortement sur un grand nombre de jeunes. Les mesures de prévention actuelles ne suffisent manifestement plus. La situation en matière de consommation de substances et de certaines pratiques problématiques ne s'améliore pas et reste préoccupante.

Il faut donc d'agir sans délai, et ce à tous les niveaux. La santé psychique peut avoir une influence sur la consommation de substances, mais l'inverse est également vrai. Addiction Suisse exige en priorité les mesures suivantes :

Faire respecter les interdictions de vente : les jeunes parviennent à se procurer de l'alcool dans les commerces et les restaurants malgré les dispositions en vigueur dans un peu moins de 30 % des cas. Sur Internet, les ventes illégales sont encore plus fréquentes. Il est temps que les interdictions soient enfin prises au sérieux.

Réduire la demande en limitant la publicité et en relevant les prix : des études montrent qu'il n'est pas possible de protéger les jeunes sans agir sur la demande. Pour cela, il faut diminuer l'attrait des substances psychoactives (et des usages) qui peuvent engendrer une addiction, par exemple en restreignant plus fortement la publicité qui atteint les jeunes. La consommation de substances ne doit plus être la norme. Ce n'est pas pour rien que la dernière Session des jeunes a réclamé l'introduction du paquet de neutre pour les produits de la nicotine et de l'alcool ainsi que pour les stupéfiants. Il faudrait également adopter des prix minimaux, car le prix est un élément auquel les jeunes sont très sensibles.

Renforcer la prévention basée sur les preuves : la " sensibilisation à l'école " n'a guère pu démontrer un effet préventif et peut même être contre-productive suivant le thème abordé et l'âge. Il s'agit de promouvoir le financement de la prévention et d'investir désormais davantage dans des programmes de prévention dont l'efficacité a été démontrée.

Renforcer l'intervention précoce (IP) : les données montrent une hausse du nombre de jeunes qui ne vont pas bien. Il faut donc consacrer plus de moyens au repérage et à l'intervention précoces à l'école ou durant l'apprentissage, dans le cadre du travail social et dans le domaine de la santé. Les longs délais d'attente pour consulter un·e psychologue peuvent avoir de lourdes conséquences.

Renforcer le travail éducatif et les ressources des jeunes : les expériences et les hobbies, de même que les relations sociales dans le monde physique, renforcent les jeunes. Le sentiment d'efficacité personnelle et le fait de pouvoir compter sur les proches les aident par exemple à gérer le stress. Les parents jouent un rôle important pour accompagner et soutenir leurs enfants, mais pour cela, ils ont eux-mêmes besoin d'un plus grand soutien.

Retrouvez le dossier complet en annexe!

L'essentiel en bref (population en général):

Alcool

Depuis 1992, la part des personnes qui consomment de l'alcool tous les jours a diminué d'une bonne moitié. En revanche, hommes et femmes boivent davantage à certaines occasions : la proportion de personnes qui s'enivrent au moins une fois par mois s'élève à 19 % pour les premiers et à 11 % pour les secondes.

Bien que l'alcool soit, en raison de l'ampleur de sa consommation, la substance psychoactive qui provoque le plus de dégâts avec le tabac et qui nécessite le plus de traitements, on ne discerne aucune volonté d'action au niveau politique. Le vent est même à la dérégulation dans certains cantons.

Il faudrait mettre en place des mesures préventives qui tiennent compte des modes de consommation actuels : restriction des ventes d'alcool la nuit, prix minimaux pour lutter contre l'alcool bon marché et interdiction de verser de l'alcool à des personnes ivres.

Produits tabagiques et nicotiniques

L'usage des puff bars a favorisé l'émergence d'un nouveau groupe de jeunes qui consomme la nicotine sans que la consommation de cigarettes conventionnelles diminue pour autant. Chez les adultes, le léger recul enregistré pour les cigarettes conventionnelles est compensé par la consommation d'autres produits nicotiniques.

A l'inverse d'autres pays, la Suisse n'a pas encore implémenté de nouvelles mesures sur le plan politique, de sorte que la consommation de nicotine reste stable chez les adultes et progresse chez les jeunes. L'initiative " Enfants sans tabac ", que le peuple a acceptée, doit être concrétisée sans délai.

Mais l'industrie du tabac tient la majorité du Parlement sous sa coupe et fait pression pour édulcorer la mise en oeuvre de l'article constitutionnel. Il est grand temps de mettre fin à cette ingérence dans la politique de la santé.

Cannabis et d'autres drogues illégales

La diffusion de l'usage de cocaïne base (crack, freebase) auprès de populations déjà marginalisées et la visibilité de la consommation de drogues dans l'espace public sont en augmentation. La disponibilité et la consommation de cocaïne, ainsi que les problèmes qui y sont liés, sont en augmentation en Suisse et en Europe. Cette situation nécessite une approche collective pour réfléchir à l'adaptation de la mise en oeuvre de la politique des quatre piliers.

Les nouvelles données concernant le cannabis suggèrent une consommation plutôt stable chez les adultes et chez les écoliers. Au niveau mondial, la tendance vers un nouveau mode de régulation se confirme, avec des légalisations dans plusieurs juridictions. En Suisse, des essais pilotes de vente de cannabis ont commencé et un projet de loi est en phase de développement.

Médicaments psychoactifs

L'utilisation de médicaments en combinaison avec d'autres substances et l'abus de médicaments sont des pratiques dangereuses répandues chez les adolescent-e-s ; 12 % des jeunes de 15 ans les ont déjà expérimentées. Les résultats d'études plus approfondies montrent la nécessité de renforcer la prévention (basée sur les preuves).

Les ventes de somnifères et de tranquillisants avec un potentiel de dépendance sont stables, mais se maintiennent à un niveau élevé. La pandémie a entraîné des difficultés que certaines personnes, y compris des jeunes, essaient de surmonter en prenant ces médicaments.

Les ventes d'antalgiques opioïdes puissants ont sensiblement augmenté dans le passé, mais il semblerait qu'un léger recul se dessine à présent.

Jeux de hasard et d'argent

Les adeptes de jeux de hasard et d'argent sont souvent des personnes relativement jeunes, des hommes pour la plupart. Les jeux d'argent comportent des risques particuliers ; ils peuvent engendrer une perte de contrôle et des dépenses excessives. L'endettement moyen des personnes qui consultent un service de conseil en matière de dettes atteint quelque 88 000 francs.

La proportion de joueurs-euses en ligne qui présentent un comportement de jeu problématique semble avoir doublé en trois ans. Par ailleurs, près d'un demi-million de personnes ont rencontré des problèmes avec le jeu de hasard et d'argent au cours de leur vie. Il faudrait repérer et soutenir plus rapidement les individus concernés et mettre en place davantage de mesures innovantes et basées sur les preuves dans le domaine de la prévention.

Activités en ligne

Les jeux vidéo et les réseaux sociaux présentent de nombreux aspects positifs, mais comportent aussi des risques. Visuellement, ils ne se distinguent plus guère entre eux ni par rapport aux jeux de hasard et d'argent, dont ils reprennent certains mécanismes. Ceux-là incitent à passer beaucoup de temps en ligne et à y dépenser de l'argent, au risque d'une perte de contrôle. Des données récentes montrent que 3 % environ des 15 ans qui jouent aux jeux vidéo en auraient un usage problématique et qu'environ 7% des 15 ans auraient un usage problématique des réseaux sociaux. La population et les mineur·e·s en particulier doivent être protégés sans délai et de manière efficace contre des mécanismes qui visent à les influencer.

Contact:

Markus Meury
Porte-parole
mmeury@addictionsuisse.ch
021 321 29 63

Monique Portner-Helfer
Porte-parole
mportner-helfer@addictionsuisse.ch
021 321 29 74